par Laurianne Chignard
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16 décembre 2025
Un projet de loi propose actuellement de retirer des contrats de mutuelle le remboursement des pratiques considérées comme « médecines douces ». Derrière cette mesure, l’intention est de limiter les dérives et de recentrer les financements sur des pratiques validées scientifiquement. Pourtant, de nombreux patients s’inquiètent déjà de ses conséquences collatérales, notamment sur l’accès aux consultations diététiques. Dans les faits, les mutuelles constituent aujourd’hui le principal soutien financier permettant à beaucoup d’entamer un suivi nutritionnel, faute de remboursement par la Sécurité sociale. Cette confusion n’est pas nouvelle. Dans l’esprit collectif, la diététique est encore trop souvent assimilée à une approche de bien-être ou à une pratique alternative, alors que la profession repose sur des bases scientifiques solides et bénéficie d’un cadre légal strict. Les diététiciens sont reconnus comme profession de santé par le Code de la santé publique. L’article L. 4371-1 définit clairement notre rôle : accompagner l’éducation et la rééducation nutritionnelle, participer à la prévention et intervenir sur prescription médicale auprès des patients présentant des troubles du métabolisme ou de l’alimentation. Le titre de diététicien est lui aussi encadré et protégé par l’article L. 4371-2, qui réserve ce nom aux professionnels diplômés. Les articles R. 4371-1 à R. 4371-5 précisent enfin les actes autorisés et les limites d’exercice. Il ne s’agit donc en rien d’une médecine douce. La diététique fait partie intégrante du champ paramédical, aux côtés des infirmiers, des kinésithérapeutes ou des orthophonistes. Ce positionnement juridique contraste pourtant avec la réalité du financement : les consultations diététiques n’entrent pas dans le périmètre de prise en charge de l’Assurance maladie. Cette incohérence crée un paradoxe dont mes patients sont les premiers à pâtir. Ils sollicitent une prise en charge nutritionnelle pour un motif de santé, auprès d’un professionnel de santé, mais doivent, en l’absence de remboursement obligatoire, dépendre du bon vouloir de leur mutuelle. Ce paradoxe est d’autant plus problématique que le surpoids, l’obésité et les maladies métaboliques constituent aujourd’hui des enjeux majeurs de santé publique. Pour y répondre, le système de soins mobilise une multitude de professionnels – sages-femmes, infirmiers, kinésithérapeutes, psychologues, éducateurs sportifs – chacun avec sa spécificité. Pourtant, l’alimentation étant une composante quotidienne, répétée, et déterminante de la santé, elle nécessite l’expertise d’un professionnel dont la formation est entièrement dédiée à la nutrition : le diététicien. Je crois profondément qu’il est temps de clarifier l’organisation des parcours de santé. Il serait cohérent de replacer les diététiciens à leur juste place : celle du référent nutritionnel, formé, diplômé et réglementé. Rendre ces soins accessibles permettrait d’éviter les prises en charge incomplètes ou inadaptées, de réduire le recours à des pratiques non validées et de renforcer la prévention. Nous mangeons tous, chaque jour, plusieurs fois par jour ; la nutrition influence toutes les dimensions de notre santé. L’accès à un accompagnement diététique structuré n’est pas un confort, mais un besoin essentiel.